Suite des précédents billets (ici et là) sur la recherche d'une méthode non invasive de mesure d'efforts et temps de récupération chez un équidé en situation réelle de travail.
Voici un petit récapitulatif des données observées/calculées à partir de notre observation non-invasive...
Longueur de ligne moyenne : 78 m
Vitesse de travail moyenne: 1,06 m/s (3,81 km/h)
Temps de travail total (pour cette intervention) : 57 mn et 10 s
Réparti ainsi :
Effort inférieur à 6 kgf (0 - 6 kgf), pendant 35 mn, 62 % du temps total
Effort de 6 à 44 kgf, pendant 8 mn, 14 % du temps total
Effort supérieur à 45 kgf, pendant 14 mn, soit 24 % du temps total
Nota 01 : Une donnée toutes les 0,1865 s, 11368 données inférieur à 6 kgf, soit 2120 s ou 35 mn/57 mn (62%), 2654 données entre 6 et 44 kgf, soit 495 s ou, 8 mn/57 mn (14%), 4368 données supérieur à 45 kgf, soit 815 s ou 14 mn/57 mn (24%).
Plage d'effort quand l'outil travaille : de 45 kgf à 150 kgf
Effort moyen quand l'outil travaille : 97 kgf soit 97 x 9,81 = 951,57 N (1 kgf = 9,81 Newton)
70 % des valeurs présentes sont comprises entre 78 kgf à 116 kgf (Moins un écart-type, plus un écart-type).
Angle de traction par rapport au déplacement du cheval : 12,9 °, soit un cos(12,9) = 0.9747
Nota 02 : On peut remarquer aussi que l'angle de traction est faible (12,9°) par rapport à l'angle théorique (15°), sur la photo de profil en traction, l'angle d'inclinaison du collier sur l'épaule, semble un peu trop vertical. Épaule très verticale sur ce cheval ? collier trop serré en haut ? position des crochets trop basse? ... A vérifier...
Puissance moyenne nécessaire pour que l'outil travaille :
La Puissance (en watt) = Force (en Newton) x cos α x Vitesse (en mètre/seconde)
P = 951,57 x 0.975 x 1,06 = 983,5 W
Pour rappel, voici une diapo sur l'Énergie.
L'énergie totale fournie par le cheval pendant le temps ou l'outil travaille effectivement est égale à E = P x t
Soit E = 983,5 w x 815 s = 801552 Joules,
comme 1Wh = 3600 J
on a E = 801552/3600 = 223 Wh (Watt-heure, Wh, unité d'énergie souvent utilisée en électricité, plus parlante).
Que l'on pourrait exprimer autrement, pendant sa séance, le cheval à travaillé effectivement 815 s (soit 815/3600 = 0,226 h) à une puissance de 983,5 W.
Il a donc fourni 983,5 x 0,226 = 223 Wh (pendant que l'outil est en terre).
Nota 03 : On ne considère ici que l'énergie nécessaire à la traction de l'outil, sans prendre en compte l'énergie que le cheval dépense pour se mouvoir lui-même.
Que peut-on conclure à partir des données recueillies :
Quand l'outil travaille, l'effort moyen peut être qualifié d'important (97 kgf), ce qui se confirme dans la valeur de la puissance nécessaire (983 W) qui est supérieure à un cheval vapeur (735,5 W). Par contre, le temps de travail effectif de l'outil pendant la séance reste faible (24 % du temps total) soit une durée totale de 14 mn.
L'énergie fournie par le cheval pour le travail effectif est de 223 Wh.
Pour l'instant, nous n'avons pas beaucoup de données de comparaison.
On remarque simplement que la mesure de la durée et la répartition des temps de travail avec des efforts effectifs/légers/faibles sont des données qu'il faut absolument prendre en compte dans une observation globale de l'énergie demandée au cheval dans sa séance/journée/semaine de travail.
La mesure de la durée des efforts :
En effet, on ne peut pas se contenter de mesurer seulement les valeurs des efforts effectifs, on doit aussi prendre en compte leur durée.
Avec un effort moyen et une vitesse de travail identique en labour par exemple, mais des temps en effort effectif beaucoup plus longs, nous n'aurions pas du tout les même impacts sur la fatigue. L'énergie demandée étant beaucoup plus forte.
La répartition des temps de travail :
De plus, si l'on veut aussi prendre en compte la récupération après l'effort et la santé sur le long terme de l'animal, on doit aussi étudier la répartition des plages d'efforts importants/légers/faibles pendant une séance.
Cette prise en compte peut être globale si la séquence est courte comme ici et doit être plus précise si l'effort est intense (débardage par exemple) ou continu (labour) par exemple, et/ou si ces efforts se reproduisent plusieurs fois sur une période plus longue (journée/semaine...).
Le matériel minimum nécessaire pour mettre en œuvre la méthode d'observation non-invasive : un appareil photo et un DataPalo.
Que peut-on conclure à propos de la méthode d'observation proposée.
On peut tout d'abord rappeler pour mémoire les principes de la méthode :
1) Dans une situation réelle de travail, mesure continue des efforts (nuls, faibles ou forts) pendant tout la durée de la séance (1 heure, 1/2 journée, 1 journée, un chantier...).
2) Filmage continu de la séquence ou au moins de l'ensemble des différentes phases (harnachement, mise en place, réglage de l'outil, travail sur plusieurs lignes, arrêts, demi-tour, pauses, retour, désharnachement...)
3) prise de Photos/film latérales au travail (pour l'angle de traction).
4) Mesure longueur parcelle/ligne/traîne... Mesure nombre de lignes/surface... Mesure longueur parcourue et vitesse de travail...(on pourra utilement utiliser une photo aérienne de la parcelle et/ou une trace GPS avec un smartphone embarqué sur le cheval et/ou un odomètre/tachymètre).
En option :
5) Si cela est souhaité, retour oral chaque seconde des valeurs moyennes au meneur pour information.
6) Mesure fréquence cardiaque (du cheval et du meneur).
7) Mesure hauteur garrot et tour de poitrail pour vérification des formules de calcul de la capacité d'effort potentiel théorique (nous aurons l'occasion de discuter des ces formules une autre fois)
8) S'informer du poids du cheval, s'il est connu. Voir peser le cheval si c'est possible.
En conclusion :
La méthode d'observation proposée, la moins invasive possible, permet quand même de relever un certains nombres de données chiffrées tout en n'interférant que modérément avec le travail du couple cheval/meneur.
Elle peut donc être plus facilement mise en place, mieux acceptée par les intervenants, voir se dérouler sur un temps long (typiquement sur une semaine, la durée d'un chantier, voir même une saison) pour permettre des observations sur l'énergie demandée, la fatigue et la récupération sur le temps long.
Le recueil de nombreuses données dans des situations de travail différentes, par cette méthode d'observation simplifiée, permettra à terme de tirer des enseignements sur l'énergie que l'on peut attendre d'un cheval de travail sur un temps long, en respectant son intégrité et sa santé. Ces données pourront servir de base de réflexion pour les notions de bien-traitance.
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