Quand Bernadette Lizet m’a informé qu’elle allait rééditer son livre "Le cheval dans la vie quotidienne" qu’elle avait écrit en 1981, je m’en suis vraiment réjoui…


Le cheval dans la vie quotidienne, Éditeur : CNRS (12 novembre 2020),
ISBN : 978-2-271-13450-9, 320 p, 25 €

Il faut dire ici, que ce livre a été un ouvrage fondateur pour nous, les membres de l’association Hippotese (qui ne fut officiellement crée qu’en 1987) et sans doute aussi pour beaucoup d'autres, qui ne font pas parti du sérail et n'ont pas 4 générations d'ascendants dans le milieu du cheval et/ou une culture équestre étendue.

En effet, ce bouquin nous a permis d'acquérir le socle de connaissances que tous les passionnés de chevaux de travail devraient posséder. Il propose un ensemble d'informations et de mises en contexte qui sont la base minimale de notre bagage culturel sur le "cheval utilitaire",

Par exemple, il explique comment au XIXe siècle, l'aristocratie européenne, à la recherche du cheval parfait (proche du pur-sang arabe), et sous l'influence des Haras Nationaux qui répondaient à la demande de l'armée, a favorisé la disparition des petits "chevaux de pays", rustiques et endurants, issus d'une sélection paysanne séculaire.

Autre exemple : Cet ouvrage nous aide à mieux comprendre pourquoi la période 1850-1920 fut l'âge d'or du "cheval de labeur", avec ses usages et ses excès (la loi Grammont contre les mauvais traitements date de 1850).
La poste utilisait alors 20 000 chevaux, les omnibus parisiens 14 000 et le renouvellement était de 3 à 4 chevaux/jour en moyenne (1000 à 1200/an).
Même si ces entreprises traitaient bien leur animaux, ce n'était pas forcément le cas des propriétaires suivants qui les rachetaient à bas prix.
C'est l’hippophagie naissante, promue par la Société Protectrice des Animaux (avant 1850, la consommation de la viande de cheval est interdite par l'église) qui redonne une valeur marchande aux chevaux en fin de carrière et les sauve ainsi d'une utilisation "jusqu'à ce que mort s'ensuive"...

Ou encore, ce bouquin nous éclaire sur les techniques de vente (parfois trompeuses) adoptées par les maquignons et les marchands de chevaux pour relustrer, le temps d'une foire, un poil trop terne ou encore qui profitent des traditions locales, parfois différentes d'une région à l'autre, pour acheter à bas prix tels animaux de race, robe ou même sexe (certaines régions n'utilisent que les mâles entiers, d'autres les juments, d'autres encore les hongres) peu cotés ici et les revendre là avec un substantiel gain dans une région où ils sont plus appréciés.

On y apprend aussi pourquoi le ferrage des chevaux de mine est spécifique (pour résister à la boue, aux traverses et aux rails et surtout au pincement traître des aiguillages qui arrachent les fers), ou comment les fers des "pailleux" qui livrent les villes en litière et font 50 km/jour sur des routes usantes sont plus épais...

Après la lecture de ce livre, vous différencierez le limonier, le cheviller et le "cheval de volée", vous connaîtrez le "roulier" et le "camionneur", vous vous méfierez du "chevalier" comme du "haricotier" et vous saurez tout sur les "chabines" et les "colliers à glaces" …
Bref, vous aurez fait un voyage immobile mais passionnant dans l'histoire du cheval de travail…

Je peux, sans honte, avouer ici que ce "Cheval dans la vie quotidienne" a été (et est encore) le point de départ de nombreuses recherches que nous avons entrepris sur les savoirs-faire, les harnais, les amortisseurs de traction, la mesure des efforts... et plus généralement le matériel hippomobile.

Peutêtre une bonne idée de cadeau de noël ?

Et d'ailleurs, à ce propos, moi, je vais vous faire quelques cadeaux...
Pour illustrer mon propos d'aujourd'hui, j'ai retrouvé cette affiche de la loi Grammont de 1850 citée p177 (et 2 cartes postales sur l'Hippophagie, la première de l'abattoir de Vaugirard est dans le livre mais pas la seconde de la boucherie chevaline (impressionnante))...

J'ai aussi, enfin, déniché un document qui est cité à la page 152 (Emploi et mesures de la force des animaux, La Magasin Pittoresque, Paris, 1880), que je cherchai depuis longtemps...
En fait, c'est dans le numéro du MP de 1835 que je l'ai retrouvé...
Si j'ai le courage, je vous ferai quelques compléments explicatifs sur ces données bientôt...

Deny Fady