Suite du précédent billet sur la recherche d'une méthode non invasive de mesure d'efforts et temps de récupération chez un équidé en situation réelle de travail.
Nous en étions resté au calcul de la puissance instantanée demandée au cheval :
La Puissance (en watt) = Force (en Newton) x Vitesse (en mètre/seconde)
NB1 : on aurait aussi pu écrire que la puissance P (watt) = Travail (joule ou newton.mètre) / Temps (en seconde) car le Travail est le déplacement d'une force (N) x une distance (m)
NB2 : Quand la force n'est pas tout à fait alignée avec le déplacement et forme un angle, on utilise le cosinus de cet angle pour le calcul.
Pour mémoire, je vous redonne les 3 diapos que j'avais réalisé dans une présentation à Avignon en 2018.
Nous avons une vitesse moyenne de 0,942 m/s (voir billet précédent, partie 1)
Nous avons un angle de traction par rapport à l'horizontale de 12,9 °, soit un cos(12,9) = 0.9747 (voir billet précédent).
Mais quelle est la force moyenne développée par le cheval pour ce travail de buttage de poireaux ?
Si l'on regarde la courbe totale des efforts mesurés au DataPalo et mis en forme avec notre application DataGraph pendant l'heure de travail...
On constate, à vue de nez, que l'effort varie de 0 à 140 kgf, avec une tendance moyenne autour de 100 kgf.
Traçons maintenant la courbe de fréquence d'apparition des valeurs d'effort :
Si on regarde la courbe de fréquence d'apparition des valeurs d'effort sur la période, on constate que les valeurs autour de 0 sont très nombreuses, ce nombre baisse ensuite très fortement jusqu'à 45 kgf environ puis la courbe forme une courbe de Gauss.
NB3 : La courbe de Gauss est connue aussi sous le nom de « courbe en cloche » ou encore de « courbe de la loi normale ». Elle permet de représenter graphiquement la distribution d’une série et en particulier la densité de mesures d’une série. Elle se base sur les calculs de l’espérance et de l’écart-type de la série. Pour un échantillon important, il est généralement constatée une courbe en forme de cloche, c’est-à-dire une forte concentration des valeurs autour de la moyenne puis des valeurs de moins en moins nombreuses aux extrémités de la série. (https://www.soft-concept.com/surveymag/definition-fr/definition-courbe-de-gauss.html)
Cette courbe est logique car il y a de nombreux moments où l'outil ne travaille pas :
- 1 temps de déplacement de l'outil jusqu'à la parcelle (et retour),
- 2 temps de retournement en bout de ligne,
- 3 temps de réglage des outils,
- 4 temps de nettoyage des dents,
- 5 arrêt demandé par le meneur pour pose/réflexion/échange/casse-croûte...,
- 6 arrêt non demandé, imposé par le cheval...
Ces données nous renseignent sur les temps de repos/récupération du cheval qui sont très importants et qu'il faut prendre en compte.
On peut considérer :
Qu'un effort de 0 à 5 kgf ne représente aucun travail (pas de mouvement ou seulement un balancement de la chaîne, sans traction),
Qu'un effort de 5 à 45 kgf représente un effort faible avec l'outil relevé (déplacement de l'outil jusqu'à la parcelle, retournement en bout de ligne),
Qu'un effort supérieur à 45 kgf représente la force nécessaire pour réaliser effectivement le travail de buttage.
On peut donc trier par ordre croissant les 18391 valeurs relevées, soit un enregistrement de 10 valeurs toutes les 2s (en fait, toutes les 1,865 s) soit 1 valeur tous le 2 dixièmes de seconde ou 5 données par seconde environ pendant une heure (de 11:06:39 à 12:03:49 soit 57 mn et 10 s ou 3430 s).
On obtient :
-1 11368 valeurs inférieures à 6 kgf -> 61,81 %
-2 2654 sont entre 6 et 44 kgf -> 14,43 %
-3 4368 sont = ou sup à 45 kgf -> 23,75 %
Comme ces données correspondent à des temps, sur l'heure d’activité nous avons en pourcentage du temps passé :
Par contre, on ne peut pas calculer la moyenne de l'effort effectif de buttage à partir de ces données, car cette moyenne serait forcément minorée (avec tous ces moments "sans effort").
On peut alors demander à l'application Datagraph de représenter la courbe de fréquence d'apparition des valeurs d'effort uniquement supérieurs à 45 kgf, on obtient la courbe suivante :
On a donc la moyenne de l'effort "en travail" qui est de :
97 kgf soit 97 x 9,81 = 951,57 N (1 kgf = 9,81 Newton)
NB4 : La plage 78 kgf à 116 kgf (Moins un écart-type, plus un écart-type) correspond presque 70 % des valeurs présentes.
NB5 : L'écart-type est une mesure de la dispersion des valeurs d'un échantillon statistique ou d'une distribution de probabilité (https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89cart_type).
Nous avons maintenant les données nécessaires au calcul de la puissance moyenne développée par le cheval quand l'outil travaille effectivement.
A savoir :
La Puissance (en watt) = Force (en Newton) cos α x Vitesse (en mètre/seconde)
soit : P = 951,57 x 0.975 x 0,942 = 873,96 W (874 W)
NB6 : Un cheval vapeur (ch) = 735,5 W
Le cheval-vapeur est une unité de mesure initialement créée par James Watt, qui souhaitait vendre les machines à vapeur de sa firme à des industriels ou des cultivateurs pour faire fonctionner des ateliers ou des engins agricoles. Ses clients potentiels utilisaient précédemment des attelages de chevaux, en chair et en os, pour effectuer ces travaux, il fallait créer une unité qui soit « parlante » pour que l'éventuel client ait un point de comparaison entre les deux sources d'énergie. James Watt effectua un certain nombre de comparaisons entre les machines de sa fabrication et de véritables chevaux entraînant une lourde roue tournant autour d'un pivot central, comme dans certains types de pressoirs agricoles et ce durant plusieurs heures.
''Même si la puissance maximale développée par un cheval pendant un temps court peut être de dix à presque quinze fois supérieure à un cheval-vapeur, on considère que dans le cadre d'une activité soutenue, une puissance moyenne d'environ 1 ch (0,75 kW) par cheval est effectivement conforme aux conseils agricoles des XIXe et XXe siècles.
Références a télécharger : R. D. Stevenson et Richard J. Wassersug, "Horsepower from a horse", Nature, vol. 364, no 6434, juillet 1993 et E. Collins et A. Caine, "Testing draft horses", cité sur Wikipédia.''
Nous aurons l'occasion de reparler de tout cela dans la troisième partie de ce billet...
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