Hippotese, Le cheval de Travail

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Mot-clé - Tanneguy de SAINTE MARIE

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samedi 11 août 2018

La disparition des Haras... Dans l’indifférence générale...

Au sujet du Tractomètre de Lambale, j'ai déjà eu la possibilité de vous parler de la nécessité de sauver cet appareil unique au monde et j'espère vous avoir convaincu de l'intérêt technique, historique et patrimonial qu'il représente...

Dans la même philosophie, je vous fais suivre (avec son autorisation) une lettre ouverte de Tanneguy de SAINTE MARIE qui reprend ce sujet de façon plus large et qui mérite, à mon avis, d'être connue de tous...

Vous pouvez, si vous le jugez utile, diffuser plus largement...

Deny Fady


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Tanneguy de SAINTE MARIE
2 hameau de la Serverie
14570 Saint Rémy sur Orne

tel 06 76 81 51 80
mail tanneguysm@gmail.com

La Serverie, le 25 juin 2018

Dans l’indifférence générale

En 1947, un projet de loi prévoyant la suppression de l’Administration des Haras est soumis au vote du parlement. Il n’est pas adopté.

En octobre 1965, à l’occasion des festivités du tricentenaire de l’Administration des Haras, au Haras du Pin, le ministre de l’Agriculture, Edgar PISANI, annonce l’organisation prochaine de la « réforme » de cette institution, devenue sans utilité stratégique pour l’État.

En 1968, le corps spécifique des « Officiers des Haras » est dissout. Ses derniers membres sont intégrés au corps des Ingénieurs du Génie Rural, des Eaux et des Forêts. ( IGREF ).

Dans les années 1980, le corps des Agents, Gardes des Haras, est dissout. Ses derniers membres sont intégrés dans les corps des Agents Techniques du Ministère de l’Agriculture.

En 1999, sans autre forme de procès, l’Administration des Haras disparaît au profit d’un nouvel Établissement Public à caractère Administratif : « Les Haras Nationaux ».

Le 28 décembre 2001, nos parlementaires, dans leur quasi unanimité ( et à l’unanimité de ceux de Normandie ) votent la Loi de Finance 2002 qui comporte la fin du financement direct des Haras Nationaux par un prélèvement de 0,8 % sur les jeux sur les courses hippiques. Cette institution était la seule administration française qui ne coûtait pas un sou au contribuable. Le ministre du budget qui, sans sourciller, met en œuvre en 2002 cette réforme s’appelle Alain LAMBERT .

A partir de 2005, les achats d’étalons sont réduits à leur plus simple expression et le recrutement de personnels compétents se raréfie de façon drastique.

En 2010, est créé l’Établissement Public Administratif « Institut Français du Cheval et de l’Équitation » avec absorption de l’ENE (mariage de la carpe et du lapin ! ).

Durant ces périodes, se sont succédées les fermetures de toutes les stations de monte et des dépôts d’étalons de Strasbourg, Montier en Der, Annecy, Blois, Rodez, Tarbes, Saintes, Compiègne, Villeneuve sur Lot, de même que la jumenterie de Pompadour . Sont sur la liste pour des fermetures prochaines, Les Bréviaires, Gelos, Cluny, Saintes, ….

Toutes ces fermetures s’accompagnent, dans l’indifférence générale, de l’évaporation systématique des matériels meublant les selleries d’honneur, d’astiquage et de travail, les ateliers de sellerie, de bourrellerie, de menuiserie, de ferronnerie, de forge et maréchalerie, de peinture, les bibliothèques, les archives, les réserves, les lanternes, les fouets, les coussins, les bois de bouches, les tord nez, les longes, les bricoles de monte et leurs entraves, les grandes guides, les bridons d’abreuvoirs, les licols, les uniformes … .

Les nouveaux « responsables mais pas coupables » nommés à la direction des sites, sont dans la très grande majorité des cas, non issus de La Maison, afin de pouvoir mettre en application, le plus rapidement possible, les instructions parisiennes :

« Tout doit disparaître » dans le calme, la sérénité, sans heurts et sans malheurs, sans communications et sans commentaires . Aujourd’hui, les tous derniers « cailloux dans les chaussures » et les tous derniers « bois dans les rais » restent les voitures hippomobiles.

Depuis près de vingt ans, avec quelques collègues passionnés ( sans doute trop ! ) et Jean-Louis LIBOUREL, nous avons accompagné, alerté, interpellé, inventorié, publié, commenté, diffusé, expertisé,... ( tout en essayant de respecter « l’obligation de réserve » ! ).

J’ai participé durant près de dix ans aux travaux du Comité Scientifique « Cheval et patrimoine » au Ministère de la Culture. A chaque réunion parisienne et à chaque colloque nous avons alerté et avons proposé des pistes et des idées :

SILENCE ABSOLU …. « Tout doit disparaître » .

Parmi les très nombreuses propositions que nous avons formulées et écrites depuis 15 ans, en voici quelques unes :

1) Regrouper dans l’ancien dépôt de Compiègne, dont le rattachement au musée du château est souvent évoqué, une trentaine de voitures ( voire plus ), typiques des Haras Nationaux , tels que, charrettes, tilburys, petit breaks, Grand breaks, omnibus et bien sûr squelettes, de différents carrossiers, pour en faire une annexe du musée des transports.

2) Confier aux collectivités territoriales reprenant les sites ( Le Pin, Saint Lô , Lamballe, Hennebont, Rosières aux Salines, Tarbes, La Roche sur Yon, ) les voitures qui s’y trouvent en y rapprochant quelques autres.

3) Proposer aux domaines et châteaux nationaux, régionaux et départementaux ( Compiègne, Chambord, Versailles, Bouges, Chaumont sur Loire, Eu, Blois, Caen, etc... ) et privés ( Vaux Le Vicomte ) d’en accueillir dans leurs collections.

4) Conserver sur site, lorsqu’ils sont repris par des collectivités, les voitures offertes par des familles locales ou carrossées dans la région proche.

5) Susciter l’intérêt de quelques villes pour accueillir des voitures fabriquées chez elles telles que Sancoins ( Retif ), Montier en Der ( Michel pour deux squelettes ), Pau ( Lagarde & Darracq ), Toulouse, Blois, Vierzon, Périgueux, La Guerche, Bordeaux, Bayonne, Bayeux, Lyon, Le Bourg Saint Léonard, etc....

6) Informer toutes les collectivités territoriales ( Régions, Départements, Villes ) de cette menace. Elles sont toutes munies de Conservateurs du patrimoine mobilier ( DRAC en région, CAOA en département ).

Rien n’y a fait … TOUT DOIT DISPARAÎTRE.

Aujourd’hui, l’IFCE n’a ni le sérieux reconnu, ni les moyens humains, ni les compétences, ni, surtout, les finances pour lancer quelque projet que ce soit de conservations, de restaurations et, encore moins, de « déconstructions ». Donc, surtout, qu’il poursuive la politique qui lui est imposé depuis vingt ans et qu’il réussit fort bien : La politique de la terre brûlée…. La folle idée des déconstructions est ainsi fort bien adaptée à cette situation. Il fallait vraiment y penser.

« Dites moi pas que nous ne sommes pas entourés de génies qui s’ignorent ».

Tanneguy de SAINTE MARIE

PS : Dans les années 1960, un de mes oncles était officier de cavalerie chez les spahis de Senlis.
Le « Général » décida la dissolution de cette unité et … tout a disparu !
Mon grand-père, lui-même ancien officier de cavalerie, et ma famille étaient en pleurs !
A l’époque, j’avais dix ans et avais mis beaucoup de temps à comprendre cette tristesse familiale.
Aujourd’hui, la disparition des Haras Nationaux, de leurs patrimoines mobiliers et de leurs savoir-faire ne fait pleurer personne.


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La lettre ouverte au format pdf ici

samedi 14 juillet 2018

Il faut sauver le Tractomètre "Le Bihan" du Haras de Lamballe... (3ème Partie)

Suite des billets "Il faut sauver le Tractomètre "Le Bihan" du Haras de Lamballe... (1ère Partie)" visible ici... et 2ème partie visible ici...

Présentation du fonctionnement du Tractomètre "Le Bihan" par le colonel Charpy dans la Revue CHEVAL – ANE – MULET, Bulletin Officiel du Comité National Interprofessionnel des Chevaux et Mulets, janvier 1944 – 2è année – Numéro 1, par le Colonel Charpy.

Cette présentation est plus complète et plus pédagogique que cette de Yves-Marie-Francis Le Bihan dans ces dépôts de brevet (ce qui est bien logique dans la mesure où un brevet doit protéger l'invention d'un auteur et ne donner que les indications techniques strictement nécessaires à la démonstration de l'originalité de l'invention).


Revue CHEVAL – ANE – MULET, Bulletin Officiel du Comité National Interprofessionnel des Chevaux et Mulets, janvier 1944 – 2è année – Numéro 1, page 10.


Revue CHEVAL – ANE – MULET, Bulletin Officiel du Comité National Interprofessionnel des Chevaux et Mulets, janvier 1944 – 2è année – Numéro 1, page 11.


Revue CHEVAL – ANE – MULET, Bulletin Officiel du Comité National Interprofessionnel des Chevaux et Mulets, janvier 1944 – 2è année – Numéro 1, page 12.

Pour les plus techniciens d'entre-vous, je vous ai fait un petit montage chronologique des 3 schémas techniques du tractomètre "Le Bihan".

Évolution chronologique des schémas de fonctionnement du tractomètre Le Bihan 1942 - 1944

Nous verrons dans un prochain billet comment, à la même époque, de l'autre côté de l'Atlantique, les américains envisageaient les mesures d'efforts avec une toute autre philosophie...

mercredi 11 juillet 2018

Il faut sauver le Tractomètre "Le Bihan" du Haras de Lamballe... (2ème Partie)

Suite du billet "Il faut sauver le Tractomètre "Le Bihan" du Haras de Lamballe... (1ère Partie)" visible ici...

Pour compléter l'exposé du système technique proposé par le Tractomètre Le Bihan, je vous propose quelques images légendées de l'appareil...

NB : N'ayant jamais vu ni étudié l'appareil réel, j'ai légendé ces images (qui sont de Tanneguy de Sainte-Marie, je pense) à partir de ma compréhension du fonctionnement de l'appareil, des schémas des brevets et des explications du Colonel CHARPY dans la revue CHEVAL-ANE–MULET de JANVIER 1944.
J'espère ne pas avoir commis d'erreurs dans cette analyse et j'attends avec plaisir vos remarques et commentaires.


Tractomètre "Le Bihan" du Haras de Lamballe, vue d'ensemble. Légende : Deny Fady



Tractomètre "Le Bihan" du Haras de Lamballe, vue avant. Légende : Deny Fady



Tractomètre "Le Bihan" du Haras de Lamballe, vue arrière. Légende : Deny Fady


Dans le Tractomètre (en tous cas, la version d'avril 1942, voir le brevet dans le précédent billet) Yves-Marie-Francis Le Bihan a prévu 2 systèmes hydrauliques de mesure de l'effort :

1 Un dynamomètre à piston dans le prolongement du palonnier (qu'il nomme "presse hydraulique H") et...

2 Une pompe (formée de 3 pistons décalés pour la régularité P) montée sur un arbre parallèle à l'essieu et entraîné directement par celui-ci (par l'intermédiaire d'engrenages droits).

Cette pompe P permet d'imposer un effort et de simuler des démarrages en côte et/ou une charge tractée. Elle est donc réversible et fonctionne de manière identique en marche avant ou en marche arrière. Si l'on mesure la pression d'huile en sortie de cette pompe, avec un manomètre (m) on visualise aussi l'effort fourni et ce, en avançant ou en reculant.
Si l'on bloque la circulation d'huile, l'essieu est bloqué, si on limite cette fermeture, on peut imposer l'effort souhaité.
L'astuce technique du système se trouve dans le mécanisme à came et électroaimant commandé par la position d'une aiguille sur un cadran qui libère instantanément la pression d'huile quand la consigne est atteinte.

J'ai aussi trouvé un second brevet peu connu de Yves-Marie-Francis Le Bihan sur le Tractomètre.

De façon assez étonnante, ce complément au premier brevet (d'avril 1942) a été déposé seulement un mois plus tard (en mai 1942) mais il ne sera accordé que 10 ans plus tard (mai 1952) et publié en septembre 1952... Peutêtre à cause de la guerre de 1940-1945.

Dans ce brevet, il n'est plus fait mention du dynamomètre à piston, mais seulement de la pompe qui a évolué et qui est formée maintenant de 1 à 7 cylindre montés en étoile (il me semble que c'est le modèle qui est à Lamballe, visible sur les photos ci-dessus, à confirmer...).
Je pense que Yves-Marie-Francis Le Bihan a voulu protéger son nouveau système de pompe en étoile et son mécanisme à came et électroaimant mais n'a pas jugé nécessaire de protéger par brevet son "dynamomètre à piston" qui était peu novateur (même pour l'époque).



Nous verrons dans quelques futurs billets comment le Colonel Charpy présentait le tractomètre et comment, à la même époque, de l'autre côté de l'Atlantique les américains envisageaient les mesures d'efforts avec une toute autre philosophie...

dimanche 24 juin 2018

Il faut sauver le Tractomètre "Le Bihan" du Haras de Lamballe... (1ère Partie)

Lors des 3 èmes Rencontres FNCT, du 25 et 26 Mai 2018 (organisées par le Réseau Faire à Cheval, au Haras d'Hennebont, Morbillan) sur le thème de "La bien-traitance des équidés de travail", j'ai eu l'occasion de parler un peu du Tractomètre de Lamballe lors de ma présentation sur le Datafficheur et plus tard avec de nombreuses personnes sur place.

je voudrai revenir ici sur ce sujet en vous faisant partager toutes les infos que j'ai pu collecter sur cet étrange appareil, à mon avis unique au monde et qu'il faut absolument sauver de la destruction et même si possible remettre en état pour étudier ses capacités (uniques elles aussi) à faire varier indépendamment et de manière précise, sa résistance à l'effort au démarrage et en utilisation continue.

Je remercie ici Tanneguy de Sainte-Marie (qui est un grand connaisseur des Haras, de leur histoire et un auteur prolifique) et Bernadette Lizet (ethnologue et spécialiste reconnue de l'histoire des utilisations du cheval en France) qui m'ont autorisé à utiliser leurs documents et leurs écrits sur le Tractomètre Le Bihan.

Pour cette première partie, je vous partage un texte de Tanneguy de Sainte-Marie, paru en 2006 dans la revue des Haras et rediffusé dans le N°12 de Sabots-Magazine.
J'ai ajouté quelques images et documents qui proviennent du Haras de Lamballe, de Sabots-magazine, de la revue CHEVAL-ANE–MULET de JANVIER 1944 et de ma collection personnelle.


Légende : Cour du haras de Lamballe. Un palefrenier, en tenue d'été, est aux guides de l'étalon Postier Breton et un jeune officier des haras (grade de Surveillant ) est aux commandes de la machine.
D'après Tanneguy de Sainte-Marie, cette photo date des années 1950, à l'époque où il avait été envisagé de remettre en place des épreuves de traction dans les concours d'élevage et d'utilisation pour les chevaux de trait, notamment les bretons.


Histoire d’un dynamomètre devenu « L’APPAREIL LE BIHAN » communément appelé « TRACTOMÈTRE », par Tanneguy de Sainte-Marie.

Le Colonel CHARPY, brillant officier d’artillerie ayant commandé le Dépôt de Remonte Militaire de Guingamp (dont les dernières écuries seront rasées en 2006 pour accueillir la gendarmerie locale) en 1917-1918, était un passionné de l’utilisation qui devait être faite des chevaux de trait en général et des Bretons en particulier.

En 1936 il répond favorablement à la requête du comité de la Foire Exposition de Rennes qui lui demande d’organiser une manifestation hippique dans l’enceinte de la foire.

N’ayant pas obtenu les moyens financiers pour organiser un grand concours d’élevage, il songe à l’essai d’une épreuve dynamométrique.

En effet, dès 1909, la création de la Société du Cheval de Trait Léger sous la houlette du Comte de ROBIEN, a ouvert des pistes qui devraient permettre des utilisations rationnelles et pérennes des chevaux de trait.

Dans son projet d’épreuve, le Colonel CHARPY met en exergue l’opinion exprimée par Lavalard : « Pourquoi ne pas faire pour le cheval de trait ce qui a lieu pour le cheval de pur sang qui n’est livré à la reproduction qu’après avoir fait ses preuves sur l’hippodrome ? »
C’est pourquoi, dans ses propositions, le Colonel crée deux catégories dans les concours de reproducteurs, une pour les gros traits et une pour les postiers.

Ayant entrepris des recherches après la guerre de 14-18, il a découvert qu’il existait des dynamomètres enregistreurs perfectionnés et précis. Une de ces voitures appareils, ayant été utilisée à Caen dans deux des concours organisés par Mr. Bertin, présentait malheureusement trop de défauts et donc des résultats peu probants.

Quant à la voiture Américaine « COLLINS », déjà utilisée en Allemagne et en Hollande, elle était construite pour l’essai d’un attelage de deux chevaux et non individuelle, de plus son prix d’achat et le coût de son importation avaient rebuté le Ministère de l’Agriculture et Les Haras.
Elle présentait, elle aussi, des défauts et des inconvénients.

Pressé par la mise en place d’épreuves de traction à la Foire de Rennes et n’ayant pas de voiture dynamomètre à sa disposition, le Colonel CHARPY fit appel à la maison Verlinde, de Puteaux, pour qu’elle imagine et construise en hâte un appareil de fortune. L’appareil fut livré dans les temps et les épreuves se déroulèrent devant une foule immense.

Malgré ses nombreuses imperfections la machine permit de classer sans hésitation les chevaux d’après leur puissance de démarrage.
Ce fut le clou de la Foire Exposition de Rennes de 1936.


Revue CHEVAL – ANE – MULET, Bulletin Officiel du Comité National Interprofessionnel des Chevaux et Mulets, janvier 1944 – 2è année – Numéro 1, par le Colonel Charpy


Revue CHEVAL – ANE – MULET, Bulletin Officiel du Comité National Interprofessionnel des Chevaux et Mulets, janvier 1944 – 2è année – Numéro 1, par le Colonel Charpy

Mais le but n’était pas atteint, la voiture-dynamomètre idéale et sans défaut n’était pas encore inventée et tout restait à faire.

En 1939, le Colonel CHARPY rencontre Mr. de Malherbe, Directeur général des Haras, l’entretient longuement de l’intérêt des épreuves de traction et lui confirme, qu’à peu de frais, il se faisait fort de faire construire une voiture remplissant toutes les caractéristiques nécessaires à ces épreuves.

Le Directeur Général ayant entendu parler du succès de Rennes donne son accord et promet les crédits.

Monsieur Y. LE BIHAN, ancien ingénieur des chemins de fer du Nord, connu pour ses compétences techniques et son ingéniosité, de surcroît habitant le manoir de Barach près de Perros-Guirec, se fait exposer le problème à résoudre et accepte de se charger de la construction de l’appareil.

Il a non seulement le mérite de l’imagination mais également celui de la construction qu’il mène seul à son terme.

L’appareil est livré fin 1943 au Haras National de Lamballe dirigé par Monsieur Marcellin CHARPY, fils du Colonel et père de François et Marcellin ayant eux-mêmes brillamment servi les Haras Nationaux.

Monsieur Y. LE BIHAN a opéré sur place les mises au point finales de sa machine, pour laquelle il a déposé un brevet, avant sa mise en service dans les concours.

Après avoir été abandonné, oublié et rudoyé pendant des décennies dans des fonds d’écuries et autres sous-pentes, l’unique tractomètre « LE BIHAN » est présenté depuis peu en bonne place aux côtés des Breaks, Squelettes, Camions et Omnibus dans la remise hippomobile du Haras National de Lamballe.

Il ne lui reste plus qu’à retrouver sa couleur d’origine, à être restauré, et remis en état de marche d’après les plans et descriptions laissés par son fabricant sous la rubrique : "CROQUIS SCHEMATIQUE DE L’APPAREIL D’ESSAI DES CHEVAUX A LA TRACTION, Brevet Y. LE BIHAN, Ingénieur E.C.P, D’après les données du problème posé par le Colonel CHARPY".

Imaginons, qu’un jour, son sauvetage définitif soit concrétisé par un classement « Monument Historique » parmi les trop rares voitures hippomobiles ayant accédé, à ce jour en France, à cet extrême privilège.

Tanneguy de SAINTE MARIE
Ingénieur des Haras Nationaux, en résidence à Hennebont, le 15 février 2006


Reproduction du 1er Brevet d'Invention pour un Appareil pour l'essai des chevaux à la traction déposé par Yves-Marie-Francis Le Bihan, et accordé sous le numéro 884.659, le 3 mai 1943 à Paris.


Reproduction du 1er Brevet d'Invention pour un Appareil pour l'essai des chevaux à la traction déposé par Yves-Marie-Francis Le Bihan, et accordé sous le numéro 884.659, le 3 mai 1943 à Paris, page 1/2.


Reproduction du 1er Brevet d'Invention pour un Appareil pour l'essai des chevaux à la traction déposé par Yves-Marie-Francis Le Bihan, et accordé sous le numéro 884.659, le 3 mai 1943 à Paris, page 2/2.

Transcription du texte du Brevet 884.659 de Yves-Marie-Francis Le Bihan :

L'appareil que nous allons décrire peut servir à déterminer l'effort de démarrage et le travail qu'un cheval peut fournir en traction et subsidiairement à évaluer l'effort de recul que l'animal peut faire en appuyant de son arrière-main sur l'avaloir.

L'ensemble du système est monté sur un véhicule à deux roues et comprend deux éléments distincts.

1. Un appareil indicateur des efforts produits représenté par une petite presse hydraulique H à laquelle sont joints un manomètre à cadran gradué M et un manomètre enregistreur E, destinés à donner d'une part l'effort de démarrage et d'autre part à reproduire sur un graphique le travail fourni sur un parcours fixé avec une résistance à la traction imposée.

2. Un appareil pouvant réaliser le blocage du véhicule pour l'épreuve de démarrage et ensuite imposer des résistances variables à volonté pour les essais en mouvement.

Cet appareil comprend une pompe à huile à trois cylindres P avec manivelles calées à 120° pour assurer la régularité dans la résistance. Elle est mise en mouvement par l'essieu du véhicule, par l'intermédiaire d'engrenages droits. Cette pompe est munie de soupapes d'aspiration et de soupapes de refoulement toutes automatiques. Elle puise l'huile dans un réservoir R et la refoule dans une canalisation aboutissant sous une soupape S maintenue sur son siège par la pression d'un ressort dont la tension est réglée à la volonté de l'opérateur.

Cette soupape peut également être bloquée par un dispositif spécial de façon à immobiliser le véhicule tant que l'effort de démarrage imposé n'est pas atteint.

Le blocage de la soupape est réalisé par un levier 1 oscillant autour d'un axe dont une extrémité munie d'une vis de rattrapage de jeu appuie sur une came, tandis que l'autre extrémité porte sur une tige de la soupape de façon à la tenir hermétiquement fermée, immobilisant ainsi tout l'appareil. En effet, tant que la soupape de refoulement des pompes reste bloquée, les pompes ne peuvent tourner et les roues du véhicule sont de ce fait enrayées.

Pour provoquer en temps utile, d'une façon instantanée le déblocage de la soupape un système simple et très maniable est utilisé.

Un ressort de rappel r tend constamment à faire tourner la came et à libérer ainsi la soupape, mais cette came est verrouillée par un petit balancier dont une extrémité pénètre dans une encoche de la came tandis que l'autre extrémité libre se trouve en regard d'un électro-aimant.

Cet électro-aimant peut recevoir le courant d'une petite batterie, courant normalement interrompu. Le pôle négatif de la batterie est à la masse. Le courant sortant du pôle positif doit parcourir les spires de l'électro-aimant pour aboutir à une aiguille supplémentaire du manomètre montée sur le verre de celui-ci, et par conséquent isolée. Le manomètre est lui-même à la masse.

Il suffira à l'opérateur de placer l'aiguille isolée en regard de l'effort que l'on désire voir atteindre pour que l'aiguille indicatrice normale du manomètre vienne au contact de la précédente dès que cet effort est réalisé, ce qui a pour effet de fermer le circuit électrique. Instantanément l'électro-aimant attire le balancier, libérant ainsi la came et par suite la soupape.

Pour les essais dans le travail de recul du véhicule, il suffira de lire les indications du manomètre branché sur le refoulement des pompes, dont la graduation est faite en conséquence, pour se rendre compte avec précision de l'effort produit par le cheval.

Yves-Marie-Francis Le Bihan