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Rapport "Chevaux de trait : le retour ?"

IV. VILLES

2. Fiches de terrain

Fiche N°8 : Les Attelages du Londel sur la Colline aux Oiseaux

 

 1. REDACTEUR : Bernadette LIZET

Date de la rédaction : 12 août 1999

 

2. INTITULE : Les Attelages du Londel sur la Colline aux oiseaux

Mots-clefs : Jeunes en très grande difficulté, relation à l'animal, situation de travail, animation, insertion, accompagnement social, formation par et aux métiers de l'environnement.

 

3. ORGANISME

Les Attelages du Londel constituent un "dispositif d'insertion" mis en place dans le cadre du Centre Horticole du Londel (AIFST : Association Institution Familiale Sainte-Thérèse), organisme de formation et d'insertion professionnelles.

 

4. SOURCES D'INFORMATION

- Terrain (8 juillet 1999) : entretiens avec Alain Lampe, directeur du Centre Horticole, Michel Bisson, l'éducateur technique responsable des Attelages et M. Aubin (Direction de l'Environnement et du cadre de vie, Service Espaces verts et nature de la ville de Caen).

- Fiche technique du projet des Attelages du Londel (Contrat de ville, 1998)

- Bilan de l'activité, d'avril 1998 à août 1998

 

5. DATES, DUREE, PERIODICITE DE L'OPERATION

Depuis 1995, visites du parc en calèche, tous les mercredis, samedis, dimanches, jours fériés et tout l'été

 

6. REPERES HISTORIQUES, GEOGRAPHIQUES ET SOCIAUX

- Le Centre horticole du Londel

Il a été créé en 1985, à partir d'un foyer pour adolescents (14-21 ans) placés par l'Aide sociale à l'enfance, ou le juge pour enfants, dans le cadre des activités développées par l'Association Institution Familiale Sainte-Thérèse (prêtres Salésiens), dont le Centre a conservé la philosophie : "toujours mettre les jeunes en situation valorisante, plutôt que stigmatiser les problèmes". Une classe-atelier préparatoire au CAP (sur 18 mois) a très vite été ouverte pour les jeunes en échec scolaire grave, avec une spécialisation sur les métiers de l'horticulture : l'équipe pédagogique disposait de compétences internes en ce domaine, le CAP "Horticulture" est l'un des moins exigeants pour le niveau de formation générale, et la relation à la nature et au vivant qu'il implique est structurante. Le Centre obtient dès la première année de très bons résultats (80% de réussite au CAP en 1985-1986), et se fait connaître dans l'agglomération caennaise.

Un tournant est pris en 1994, lorsque s'engage une réflexion sur l'insuffisance d'une action de formation dans la montée massive du chômage. On imagine alors de "construire un tremplin entre la fin de la formation et l'entrée dans la vie active". Puis la Mission locale adresse au centre une demande spécifique, portant sur "des jeunes de moins de 26 ans en très grandes difficultés et n'ayant pas accès aux dispositifs de droit commun et encore moins à l'emploi". Une étape est franchie en 1997, lorsque qu'on dirige vers le Centre des jeunes qui ont eu des problèmes de justice, qui bénéficient de mesures de substitution à l'incarcération. L'équipe pédagogique s'est orientée vers un parti-pris "d'accompagnement social important, avec une formation professionnelle homéopathique". Et surtout la recherche de secteurs "solvables à terme" : ce sera l'environnement et ses nouveaux métiers, dans le prolongement logique des choix antérieurs, et dans le contexte de la loi Aubry et des emplois-jeunes. La thématique des déchets soulève le problème délicat d'une collusion avec l'image dégradée que les jeunes gens ont d'eux-mêmes, de leur place dans la société. Pour ce "public bien cassé" (délinquance, toxicomanie liées au chômage de la 3° génération d'immigrés) il faut "une clef d'entrée attractive dans l'environnement au quotidien, quand même un peu difficile avec les intempéries, les travaux ingrats". C'est Michel Bisson, un exploitant forestier devenu éducateur spécialisé, et par ailleurs amateur passionné d'attelage, qui la donne : le cheval de trait, l'usage de sa force motrice seront au centre du dispositif d'accueil qui inverse la proposition déjà classique de "former pour insérer" en "insérer pour former". Les reportages TV consacrés au service hippotracté de la voirie à Rambouillet (Yvelines) ont soutenu le projet : il y a "du développement économique possible"; et quand il s'accomplit en "calèche" (on joue sur le mot calèche, en argot "monter en calèche" signifie faire de la prison), l'enlèvement des poubelles devient une action valorisante, un spectacle des rues.

Le projet mûrit durant l'année 1994 : montage financier laborieux (partenariat institutionnel complexe, concurrence sévère sur les projets d'insertion) ; déception majeure pour l'éducateur technique du projet , qui apporte ses compétences combinées des mondes de la forêt, de l'insertion et du cheval : la prestigieuse circonscription régionale des Haras Nationaux, le Pin, reste sourde à toutes les sollicitations (pas de co-financement, pas de prêt de chevaux ou de matériel, mauvaise grâce pour les visites, présence des "jeunes" non négociable dans les voitures de présentation à 4 étalons, lors de la foire de Caen, en 1997...).

Mis en place en 1995, les Attelages du Londel obtiennent en 1999 le statut de "plate-forme d'insertion permanente" dans l'agglomération caennaise.

 

- Les Attelages du Londel

Les Attelages du Londel sont une "unité de travail et/ou de production spécialisée dans les chantiers liés à la protection de l'environnement, à la conservation du patrimoine naturel, à la valorisation de ce patrimoine en vue d'activités touristiques et de l'amélioration du cadre de vie, où il s'agit d'effectuer des tâches liées aux emplois verts dans la perspective de donner à voir à l'extérieur et de ce fait, valoriser l'action auprès du public". Ces chantiers impliquent un partenariat institutionnel (la ville de Caen, les communes, les centres socio-culturels...), et certains d'entre eux assurent un financement direct (promenades payantes à la Colline aux oiseaux).

Les Attelages accueillent chaque année (avec une interruption en 1996-1997) 12 personnes (entre 16 et 26 ans, une très grande majorité de jeunes hommes âgés de 18 à 24 ans), salariées sont contrat pour une durée de 12 mois (CES), qui résident à l'extérieur (en foyer, ou par leurs propres moyens). Nouveau principe de fonctionnement : remplissage permanent de la structure, mais avec une souplesse d'entrées et de sorties. Les "sorties" se font, soit vers des contrats de travail, soit vers une formation qualifiante complémentaire.

Le découpage horaire hebdomadaire prévoit 20 h de travail productif, 7 h de formation, "et le temps nécessaire à l'accompagnement et à la résolution des difficultés individuelles (logement, santé, surendettement, justice). Et à la recherche de l'activité professionnelle convenant à chacun.

Les chantiers ("travail productif") sont, sauf exception, situés dans l'agglomération caennaise (ville, banlieue, campagne, dans une rayon de 40 km). Ils sont saisonniers, divers, répondent à toutes les opportunités. Ce sont les débroussaillages de chemins (jusqu'à la plantation et à l'entretien: requalification paysagère de l'ancienne voie ferrée industrielle de Soliers), les nettoyages de plage ; les activités d'animation (prestations publiques) sont particulièrement prisées par les éducateurs : Père-Noël dans les cités, participation aux Fêtes de la musique (groupes de musiciens de rap embarqués dans la calèche). L'expérience d'animation-promenade dans un quartier sensible de Chanteloup-les-Vignes (en Seine-et-Marne) a fait vive impression (aller voir ailleurs, relativiser les difficultés - bien réelles - des quartiers périphériques de Caen). Quant à l'opération de la calèche à la Colline des oiseaux, M.B. la considère comme le point d'aboutissement du parcours (voir rubrique 8). Les tentatives de pénétration de la sphère de la compétition locale (concours d'attelage organisés par l'Association des éleveurs et utilisateurs du Percheron du Calvados) ont tourné court . Trops sélectifs, et trop encombrés par les questions de l'apparence et du paraître : les jeunes mordus du Centre se débrouillaient bien dans les épreuves de maniabilité et de marathon, mais celle de présentation les révoltait, et le regard des autres meneurs les dérangeait. M.B. tient pourtant à relier la pratique équestre des stagaires du Londel à ce qui se fait ailleurs dans le monde du cheval. Chaque année, le Salon du cheval de Paris permet d'en découvrir la diversité, du cuir anglais au pakistanais, du "Trait" au "cheval-roi", l'Arabe (qui "raccroche" les garçons d'origine maghrébine, moins intéressés par l'attelage).

Les Attelages sont installés dans les locaux du Centre horticole lui-même, en plein tissu péri-urbain , et s'y trouvent à l'étroit (le projet d'installation dans le parc de la Colline aux oiseaux a avorté au stade de la demande de permis de construire).

La jument loge dans un box sous un petit hangar, à côté de la "sellerie-atelier", et de la réserve de paille et de foin. L'association loue une parcelle de pré pour ses repos (à 14 km), et elle part en week-end (lorsqu'il n'y a pas d'animations) avec l'éducateur, où elle rejoint deux Mérens (confiés pour dressage en attelage à M.B.). La "calèche" (un véhicule utilitaire de conception moderne, 4 roues pneumatiques, carrossage aluminium, poly-usages, avec aménagement amovible, benne/transport de personnes) est garée dans la cour. Le Centre a investi en 1998 dans l'achat de harnais (Etablissement Delaval à Saint-Lô). Auparavant, il était composé de pièces de récupération. Le camion servant pour déplacer Caressante sur les chantiers n'a par contre pas été renouvelé : on paye un transporteur.

La jument travaille 120 jours par an en moyenne, essentiellement sur le goudron : elle est ferrée par un jeune maréchal double actif (ancien éducateur, amateur d'attelage - avec un Cob -, il est aussi charpentier de marine, répare les bateaux sur le port de Courseulles-sur-Mer et ... vient de construire une roulotte légère). Rythme de ferrage: 1mois1/2 (avec pastilles de tungstène).

Alimentation quotidienne : foin et aliment complet. Catégorie compétition : le travail accompli est sérieux, et Caressante a la silhouette sèche et musclée des bêtes de service des années 1930.

- La Colline aux oiseaux

- Il s'agit d'une colline d'immondices : la décharge de la ville de Caen (qui se signalait de loin par les rassemblements de mouettes et de goélands) qui fut métamorphosée en grand jardin (17 ha), dans la double perspective de l'organisation de Floralies (exposition florale en plein air), et des fêtes marquant le cinquantenaire du débarquement en 1994 (le Mémorial se trouve à 200 m). Entre périphérique, tours et zones "artisanales", la Colline aux oiseaux a réussi sa reconversion : 200 000 visiteurs en 1995, près de 300 000 en 1998 (pour une ville de 110 000 h environ : la renommée s'est largement étendue).

- Dans les années 1970, c'est le premier adjoint au maire chargé de l'environnement de l'histoire de la ville (et l'un des premiers en France) qui conçut le projet de requalification de la décharge. La ville de Caen joue la carte écologique : l'action de lutte biologique lancée par le directeur du Service des espaces verts voilà quelques années s'est étoffée et la coccinelle est devenu l'emblème du service; en 1999, pour fêter le nouvel intitulé (Environnement et cadre de vie) et faire connaître l'action verte municipale, une fête est organisée: les Prairiales, qui valorisent la gestion "durable" de la grande prairie inondable des bords de l'Orne, en partenariat avec le Groupe ornithologique normand (fauche tardive pour permettre la nidification des migrateurs).

 

7. ACTEURS

- Acteurs pilotes: l'AIFST (le Centre horticole du Londel, les Attelages du Londel)

- Partenaires institutionnels : DDTEPFP (Direction départementale du travail, de l'Emploi et de la Formation Professionnelle ), DDASS (Direction départementale des Affaires Sanitaires et Sociales), CAF (Caisses des Allocations Familiales), DDPJJ (Direction Départementale de la Protection Judiciaire de la Jeunesse), Comité de probation d'aide aux libérés, la Mission locale de l'agglomération caennaise, les Mairies de Caen, d'Epron et de Soliers, le CPIE (Centre permanent d'initiation à l'environnement),

- Acteurs individuels (pour la prestation de la Colline aux oiseaux, le 8 juillet 1999) : l'éducateur technique, Michel Bisson, quatre jeunes gens en action-réinsertion (dont une jeune femme) et Caressante, jument-partenaire.

 

8. DEFINITION DE L'ACTION

Comme à l'habitude, le petit groupe (4 personnes, dont une fille) qui assure l'après-midi de promenades en calèche à la Colline aux oiseaux le 8 juillet 1999 (1/2 h de route environ) a préparé l'attelage avec soin, et la jument tout particulièrement : brossée, pieds graissés, filet anti-mouches sur le front, grelottière en sous-gorge. Le stationnement est à l'entrée, en vis-à-vis avec les petites voitures électriques gérées par le "Mémorial". Une petite table, une chaise, la caisse et les billets. Une pancarte accrochée sur les côtés de la voiture indique les coordonnées des Attelages . A l'arrière, un petit escabeau amovible équipé d'une rampe permet de gagner le plateau et les sièges. Travail en équipe (et rotations dans l'équipe) : on vend les billets, on les ramasse à la montée dans la voiture. Et "fouette cocher" ! (comme dit un visiteur du parc croisant l'attelage). Ici, on est plutôt meneur (la culture technique de l'éducateur). Et conteur : avant de démarrer, on explique aux clients qu'on peut raconter l'histoire de la jument (bien que beaucoup de visiteurs la connaissent déjà), du parc, de l'expérience du travail retrouvé avec les chevaux.

La promenade dure 30 mn environ, au pas et au trot, selon les possibilités qu'offre le parcours : avec une charge maximum (une douzaine de personnes adultes), les parties les plus raides (avec la vue la plus saisissante sur les tours des cités) sont inaccessibles. J'accomplis le "tour de crottin" (le dernier, pour nettoyer) avec eux, et on m'offre ces perspectives péri-urbaines inhabituelles.

Pour Michel Bisson, la récolte de pourboire (qui va bien sûr dans la poche des jeunes gens, au contraire de la recette des billets) est la preuve d'un réapprentissage de la communication dans la calèche. Ces promenades d'allure bonhomme sont le théâtre d'une énorme tension, et "le point d'orgue de leur année aux Attelages" : " ils sont en situation publique, c'est à la fois hyper valorisant, et très dur". Explication : "Ce qui m'intéresse ici, c'est de les voir aider des vieilles dames à monter sur la calèche plutôt que de les dépouiller de leur sac. Ils sont responsables des gens sur la calèche, ils ont quelque chose à transmettre : un savoir oublié par les gens qu'ils chargent, et qu'eux ont retrouvé".

Précision sur le rôle de Caressante, qui porte bien son nom : "Un cheval de 900 kg, ça ne peut que marcher, c'est un support affectif énorme... Le rapport à la violence et à la force : j'ai quelqu'un en face de moi qui est plus fort, je dois donc me maîtriser pour l'utiliser".

Le choix de l'animal-partenaire était crucial : barre de prix assez haut (au point de surprendre le maquignon qui était sur l'affaire, habitué aux prix de la viande), mais des exigences. Un animal jeune, d'un modèle puissant mais sans excès ("je ne voulais pas d'un charolais"). Et surtout, "bien dans sa tête". Au fil des années et des équipes de personnes "plutôt cassées", la jument s'est avérée solide dans ses membres (c'est une véritable jument de service), et solide dans sa tête. Il arrive tout de même qu'elle craque : elle fait "n'importe quoi", et c'est le symptôme, pour l'éducateur, d'un excès de tension dans le groupe ; quitte à bousculer le planing des chantiers, il faut la reprendre en main. Caressante, une jument "qui fait de l'éducatif", qui a "compris sa situation de travail", et qui aide à repérer les limites à ne pas franchir.

 

9. CAVALERIE

Caressante, une jument de race percheronne de 8 ans (concours de modèles et allures, concours d'attelage).

 

10. INSCRIPTION DANS LES RESEAUX

- L'échelle nationale : jardins et insertion sociale (prolongements du colloque de Lille, Fondation de France et Chantier Nature, 1997)

- Échelle de l'agglomération : partenariat des filières du social et des politiques, mais pas du monde du cheval (Haras Nationaux)

- Michel Bisson fait jouer relations et compétences dans un circuit d'éducateurs amateurs de chevaux et d'attelage

 

11. ASPECTS ECONOMIQUES

Pour les Attelages :

- Investissement

- o Caressante, 5 ans, dressée (a obtenu la coupe du Championnat d'attelage de Saint-Pierre-sur-Dives de 1995) : 15 000 f

o La voiture : 25 000 f

o Harnais neufs (prix non communiqué)

- Fonctionnement (coût annuel non communiqué)

o Nourriture et soins vétérinaires

o Ferrage

 

12. PERSPECTIVES

- Animation sur la Colline aux oiseaux : fonctionnement satisfaisant, à pérenniser

- Pour les Attelages du Londel

o Trouver un site propre (dans une ferme à proximité du Centre)

o Développer la cavalerie

o Développer une activité de débourrage : "4 ou 5 jeunes chevaux durant l'hiver, qui seraient rôdés au printemps, et notre travail apporterait une plus-value" : un maquignon de l'Orne (rencontré à la foire de Lessay) est prêt à jouer les intermédiaires"

o Faire pouliner : "passer à une véritable 2ème phase du projet, en travaillant sur la naissance, et tout ce que ça peut bousculer, ramener"

o Développer des chantiers forestiers (qui font défaut actuellement) : une piste avec la mairie de Caen et son domaine de la forêt de Grimbosc (40 km au sud :"zones d'abattage où les véhicules ne peuvent pas aller, débuscage et débardage à cheval à faire")

o Organiser des visites des visites de découverte de l'équitation (et de l'attelage) classiques (Saumur)

o Convaincre les Haras nationaux de s'impliquer comme partenaires ?

 

13. CONTACTS

Alain Lampe et Michel Bisson,

Centre horticole du Londel (AIFST), 60 rue de la Folie, 14000 Caen, tél. 02 31 44 64 08

 

14. FICHES À CONNECTER (POUR POURSUIVRE LA RECHERCHE)

- M. Lalonde, maquignon, spécialiste de Cobs (vendeur de Caressante), intermédiaire pour l'action débourrage

- M. Gaignard, maréchal-ferrant, éducateur et charpentier de marine, amateur de CT (Cobs) et d'attelage

- ADC, constructeur de la "calèche" (45170 Chilleurs aux Bois)

- L'Association d'éleveurs et utilisateurs de Percherons du Calvados

- L'Association d'attelage des Prés du Haut (près de Langon, dans les Landes): amateurs petites compétitions, prestations mariage et fêtes locales

- La cavalerie municipale de Rambouillet et une collecte d'ordures qui change d'image du service propreté

- Le réseau des CFPTA et la formation aux techniques d'attelage (l'antenne de Foix -Ariège- et l'activité de débardage à traction animale

 

15 SYNTHESE ET PISTES DE RECHERCHE

- Une préoccupation commune pour les actions d'insertion sociale des jeunes dits "en difficulté", et de relance du cheval de trait : sortir les jeunes et les chevaux de trait d'une situation de marginalité, défaire les processus de la marginalisation (requalifications croisées).

- La Colline aux oiseaux, décharge transformée en parc municipal, en zone périurbaine (périphérique, cités, zones "d'activités") : un espace précieux pour les Attelages du Londel, le "Point d'orgue" de l'année de travail. Dans ce nouveau paysage, des jeunes "cassés" éprouvent leur propre reconstruction au travers d'une activité technico-économique réinventée, qui permet de sauvegarder l'animal menacé.

- L'expérience des Attelages du Londel alimente une réflexion générale sur la question du rapport au cheval dans notre société aujourd'hui, et sur l'évolution du monde du cheval (professionnel et amateur) qui se joue avec et par l'animal

o Un monde de passions (et de conflits) : au Londel, cette affectivité, contrôlée, analysée, constitue le moteur de l'action. "C'est beaucoup plus facile de travailler avec des jeunes quand on n'est pas en relation complètement directe". Donc, la jument "est en situation de travail avec les jeunes", elle "fait de l'éducatif". Son travail est à la fois physique (tracter sur le goudron, des charges parfois considérables) et psychique (endurer des séances de brossage interminables). C'est le "thermomètre" des tensions dans le groupe (et, par un comportement soudain rebelle, le signal de limites dangereusement franchies).

o Un monde où opèrent toujours les fortes séductions de l'apparence et du paraître (au détriment, parfois, de l'être), et la loi du plus nanti, et du plus haut placé (cheval = animal emblème historique du pouvoir économique et social par le rôle de l'armée, du loisir des élites).

Les Attelages du Londel se heurtent à cette logique encore dominante, et rencontrent la résistance des instances de tutelle, les Haras nationaux (circonscription régionale du Pin). Mais d'autres "dépôts" (d'étalons) se sont ouverts à la problématique de l'insertion sociale par l'équitation (action conduite par le Haras des Bréviaires, Région Parisienne)

o Un monde (éleveurs, utilisateurs, amateurs et professionnels) qui se désenclave : la preuve en est donnée par l'hybridation actuelle de filières et de milieux. Le plus marquant dans le cadre du Londel : réseaux informels d'échanges entre les éducateurs amateurs de chevaux (de trait en particulier : du point de vue du statut social et culturel, le CT est à classer du côté de l'âne plutôt que du pur-sang)

o L'un des indices du désenclavement est la féminisation des pratiques et praticiens (en compétition, plus discrètement ) : à cet égard, le Londel se trouve contraint pas la commande institutionnelle ("marquage masculin")

o Le métissage technico-culturel peut également se faire par la thématique et la stratégie de l'environnement : nouveau venu dans les relances d'utilisation du cheval de trait, le monde des ingénieurs territoriaux (services techniques des villes en particulier) investit dans le gain d'image (qui n'est pas incompatible avec l'efficacité technique) par la traction animale.

o À Caen, la liaison avec l'expérience du Londel devrait pouvoir se faire, par exemple pour le service de propreté.

o Se dessine un réseau d'expériences régionales du travail avec des chevaux dans des tâches d'intérêt collectif et de grande visibilité sociale. La proposition des Services techniques de Saint-Pierre-sur-Dives (fédérer cette cavalerie de travail de statut communal ou apparenté en créant une catégorie spéciale dans le Championnat d'attelage organisé sur la commune, par la Société des éleveurs et utilisateurs du Percheron du Calvados) pourrait être infléchie dans le sens d'une compétition inédite, dont la fonction serait de mettre en commun l'expérience du service hippomobile réinventé sur la place publique, dans la diversité des pratiques et des styles.

 

16. DATE DE VALIDATION PAR LES ACTEURS : 28 octobre 1999