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Rapport "Chevaux de trait : le retour ?"

IV. VILLES

2. Fiches de terrain

Fiche N°1 : Il était une fois Augustodunum (Autun)

 

1. REDACTEUR : Bernadette LIZET
Date de la rédaction : 28 avril 1999

 

2. INTITULE : Il était une fois Augustodunum (Autun).
Mots-clefs : spectacle, cascade, cheval de trait de sport, stratégie municipale associative, culture néo-rurale, associations locales d'utilisateur de chevaux de trait de sport.

 

3. ORGANISME
Association Les Attelages du Morvan

 

4. SOURCES D'INFORMATION
Entretien (le 30 04 1998)

 

5. DATES, DUREE, PERIODICITE DE L'OPERATION
Spectacle annuel de deux heures (22 h/ 0 h, 100 f), donné les trois premiers week-end d'août (six représentations, vendredi et samedi), et parfois une septième représentation autour du 15 août.

 

6. REPERES HISTORIQUES, GEOGRAPHIQUES ET SOCIAUX
- Ce spectacle nocturne (son et lumière, comme ceux de Saint-Fargeau et de Beaune) a été créé en 1986 par la municipalité d'Autun, pour célébrer les deux mille ans de la ville (Augustodunum est le nom latin d'Autun), en valorisant son théâtre romain, lieu d'activité culturelle sporadique (des tragédies grecques y étaient données à la fin du XIX° siècle, et des concerts de temps en temps aujourd'hui).

- Il est composé d'une succession de tableaux, en une seule partie, et raconte l'histoire de deux familles : une romaine (d'Autun) et une gauloise (de Bibracte).

- Le clou du spectacle est une course de chars, dont les attelages sont composés de chevaux de trait.

- 700 figurants (bénévoles), pour une moyenne régulière de 1000 à 2000 spectateurs (jusqu'à 3000 : par autocars de toute la Bourgogne) : un succès durable.

- Mis en scène par Jean-Claude Baudoin, un spécialiste des spectacles historiques

- La Ville d'Autun (municipalité UDF conceptrice, reprise par l'équipe socialiste qui lui a succédé) a conçu ce spectacle comme une valorisation de la vie économique et associative locale :

o La conception et la construction des chars ont été confiées à une entreprise spécialisée d'Autun (ACCMA : structures métalliques)

o De nombreuses associations sont impliquées : l'école de musique, le club sportif (école de judo), le centre équestre (tableau de l'enlèvement des Sabines). Par ce spectacle, Autun " tient " son réseau d'associations (participation au spectacle = obtention de subventions).

o L'armée (école des enfants de troupe d'Autun) fournit la logistique (tentes des coulisses).

o La réalisation du tableau de la course de chars a été confiée aux Écuries du Morvan et à son président fondateur, Jean-Michel Olivart, animateur d'un groupe de néo-ruraux qui se spécialisent dans l'utilisation du cheval de trait de spectacle sportif (attelage de compétition, courses sur le modèle du turf, et Trait-Tract : fêtes du cheval de Sommant - une dizaine de km d'Autun, 1987 et 1988, 10000 spectateurs).

- Tout le budget municipal de "promotion" passe dans ce spectacle (pour l'image de la ville, plutôt que pour les retombées économiques).

 

7. ACTEURS
Depuis 1999, un contrat a été établi entre :

- La Ville d'Autun (et l'association Spectacle Augustodunum)

- Les Attelages du Morvan (Bernard Lavault), qui ont pris le relais des Écuries du Morvan depuis 1993 (Bernard Lavault a participé depuis le début aux opérations, mais "en dépannage" dans un premier temps).

 

8. DEFINITION DE L'ACTION
- La prestation implique 7 chevaux de trait et 14 personnes (2 personnes par cheval) ; l'équipe doit être sur place deux heures et demi avant le spectacle. Un ancien employé municipal (80 ans) est chargé de l'entretien des chars : il vient le matin pour poser des sacs de jute mouillés sur les roues pour que les moyeux en bois gonflent bien.

- Ces 14 personnes sont des "transfuges des Écuries du Morvan", une "bande d'anciens qui connaissent bien le spectacle, et qui aiment bien", et qui sont donc passés de la sphère des Écuries à celle des Attelages (c'est le même réseau d'amateurs du CT, qui en tirent plus ou moins subsistance). Ce sont des entrepreneurs forestiers (qui débardent à cheval), mais aussi des cavaliers employés de façon saisonnière aux Attelages pour mener les voitures... - Depuis 1998, Bernard Lavault coordonne la composante " cheval " du spectacle et un camp de randonnée en sulky pour des adolescents de la SNCF conçu sur le thème des voies gauloises (les attelages arrivent à Autun pour le spectacle à la fin de la randonnée) : certains jeunes se voient gratifiés d'une place sur les chars - ce qui a conduit à passer à trois personnes, car la sécurité impose d'être deux techniciens par attelage.

- Le clou du spectacle ("l'épreuve reine", dit le commentateur au micro), c'est la course de chars : trois chars à deux roues (très lourds, montés sur des roues en bois ferré pris sur de vieux chariots agricoles) attelés à deux chevaux lancés au grand galop sur 1200 m (trois tours de piste).

o Détail de ce " parc " hippomobile : un char égyptien, un romain et un gaulois (jaune, rouge et vert, les cochers et grooms en tenue " historique " particulièrement libre).

o Ce qui fait le spectacle, ce sont les chars qui se doublent, au seul endroit du tour où c'est possible : le deuxième double d'abord le premier, puis le deuxième le premier, et enfin le troisième double le deuxième (c'est donc celui qui part en dernier qui gagne)

o Tout le spectacle est pré-enregistré, sauf la course, commentée en direct par le même speaker depuis 13 ans (mais le suspense est entretenu, avec la même tension dans le commentaire au micro : qui va gagner, le romain, l'égyptien ou le gaulois ? Le speaker n'a pas découvert le "truc" de la course, car l'ordre du départ varie d'une année sur l'autre)

o La course de chars dure 1/4 d'h environ (1200 m), au grand galop, après un tour de

dans le proscenium. Le vainqueur retourne dans le proscenium pour se faire ovationner, et doit rentrer dans les temps prévus, car le noir se fait à la fin de la scène.

o Les chevaux doivent être musclés et en souffle, parfaitement calmes : ce sont des routiers de l'attelage touristique, ils sont en pleine saison (mais les chevaux qui ont de la bouteille ne mettent pas la fougue des jeunes, qui s'excitent à la course, donnant plus de piment au spectacle)L

- Les chevaux de trait ont d'autres rôles dans le spectacle :

o Participation au défilé : un cheval tire un plateau sur lequel sont posées des machines de guerre, et quatre autres chevaux attelés de front tirent le char de César, au pas.

o Un septième cheval, indépendant pendant tout le spectacle, va tirer une voiture lors d'une scène de marché dans le proscénium ; à la fin, il transportera Cybèle, une statue, sur un plateau à 4 roues, tout doucement, au pas, derrière des druides

- Les risques de la course :

o Ils sont relativement réduits : trois incidents se sont produits depuis le début (un attelage emballé - des étalons de compétition d'attelage dont c'était la première course - qui a fait cinq tours au lieu de trois, et a fini par s'arrêter tout seul ; un cheval qui s'est fauché (relevé sans mal, mais toute la course arrêtée) ; une guide cassée, empêchant le char de doubler, et obligeant un groom de devant à sauter pour arrêter l'attelage)

o Les Attelages du Morvan ont une assurance Responsabilité civile, complétée par une formule "spectateurs payants".

o Ces incidents ont permis de perfectionner le système technique : le cheval qui a tendance à tomber est maintenu (le groom possède une deuxième guide pour lui), et certaines pièces stratégiques du harnachement sont doublées, ou renforcées.

 

9. CAVALERIE
7 chevaux (Comtois de petit gabarit) : Tapioca, Rachel, Toutoune, Vitamine, Veneziza, Barbara : la cavalerie de travail des Attelages du Morvan.

 

10. INSCRIPTION DANS DES RESEAUX
(voir 14)

 

11. ASPECTS ECONOMIQUES
- Au départ : 1300 f par cheval et par soirée (6 chevaux)

- En 1998 : 1500 f par cheval et par soirée (7 chevaux, une paire de bœufs intialement présente, remplacée par un cheval : 10 000 f par soirée X 6 = 60 000 f pour l'ensemble de la prestation ; budget annuel des Attelages du Morvan : 350 000 f).

Les prix sont stables, mais une partie de l'argent est versée d'avance, à la signature du contrat (en période creuse pour les Attelages du Morvan).

- B.L. paye ses conducteurs de chars 250 f/soirée (celui assure en plus le transport en camion - qui appartient aux Attelages - reçoit des honoraires plus élevés).

- Pour B.L., Augustodunum a permis de développer un partenariat avec la Ville. Mise au point d'un nouveau " produit de vacances " , le séjour "Charette" (depuis 1995, avec le Centre de Loisirs), et animations de printemps (avec l'Union des commerçants).

 

12. PERSPECTIVE
- La Ville d'Autun envisage de changer le spectacle : un seul tableau serait conservé à l'identique, la course de chars (Augustodunum a été primé comme spectacle historique pour cette course, la seule réalisée en France).

- Comment faire pour protéger la prestation (en déposer le scénario ?) : car le risque existe de voir les cascadeurs professionnels prendre le marché : Claude Augé, qui fait déjà le spectacle de Saint-Fargeau, et qui "fait" de la course de char (en perdant une roue, et avec 4 chevaux en ligne). Le spectacle est plus technique, mais il est beaucoup plus cher, et la prestation n'est pas accomplie par une association locale.

 

13. CONTACTS
Les Attelages du Morvan (Bernard Lavault)

Allye, Cussy en Morvan, 71540 Lucenay. Tél. 03 85 82 69 12

 

14. FICHES À CONNECTER (POUR POURSUIVRE LA RECHERCHE)

- Les Écuries du Morvan

- Les Attelages du Morvan :

o liaison Augustodunum et randonnées touristiques

o animations urbaines

- Grandes fêtes du cheval de Sommant (avec trait-tract), 1987-1988

- Le réseau des cochers et grooms de la course de chars (depuis 1993)

- La course de chars de Leviers (fête internationale du cheval, Route du Comté, 1996)

- Les cascades du spectacle de Saint-Fargeau

- Les animations attelages CT de la Ville d'Autun (randonnée "Charettes" du Centre de Loisir, semaine d'animation commerciale de printemps, roulottage touristique en centre ville).

 

15. SYNTHESE ET PISTES DE RECHERCHE
- Lors de la création du spectacle, deux dynamiques se rejoignaient :

o Une stratégie municipale de valorisation du tissu associatif et de développement local dans l'élaboration du grand spectacle

o Une installation néo-rurale axée sur la valorisation militante du cheval de trait, avec une spécialistion et un savoir-faire sur le spectacle

- Moment crucial du spectacle d'Augustodunum, la course de chars met des chevaux de trait en vedette : pas question d'utiliser des chevaux de sang (c'est "l'éthique du CT).

- Ce rôle (sportif) affecté à des chevaux de trait dans un grand spectacle au succès durable, très connu en Bourgogne, a été imaginé par le président-fondateur des Écuries du Morvan, Jean-Michel Olivart, dans le cadre d'un projet d'installation néo-rurale organisée autour du cheval de trait de sport

- À la fois technique, rentable fiancièrement et prestigieuse, cette cascade de chars romains mobilise depuis 13 ans des réseaux de spécialistes du CT, amateurs et professionnels, sous l'impulsion de leaders qui gèrent tous ces savoir-faire.

- D'un leader et d'un réseau à l'autre, la fidélité à la course d'Augustodunum s'explique par une conjugaison de facteurs : passion commune pour le cheval de trait réinventé en bête de spectacle sportif, intensité des émotions du spectacle, inter-connaissance déjà ancienne entre les acteurs et les chevaux, activité correctement rémunérée.

- Ces réseaux de compétences et d'inter-connaisance dont l'ancrage géographique est assez large (une bonne centaine de km) apparaissent à la fois solides, durables et souples.

- La prestation attelée d'Augustodunum, devant plusieurs milliers de spectateurs, soulève la question du professionnalisme : du savoir-faire, une prise de risque calculée, une bonne rentabilité économique, une visibilité sociale maximum.

 

16. DATE DE VALIDATION PAR LES ACTEURS : 23 novembre 1999